lundi 31 mars 2014

Simple abri de 1943 à 1945, les années d'occupation.

CHAPITRE II     

                                                  De 1943 à 1945

La construction du petit abri commence dès le début de l'année 1943.
Et là commence la jalousie.
La voisine, riveraine à l'ouest de la voie d'accès, une vieille fille artiste peintre, se plaint alors que le chemin, débroussaillé pour la construction et pour l'acheminement de l'eau potable, est équipé d'une barrière. Elle veut accéder à l'arrière de sa propriété, dit qu'elle a droit au passage,  que le chemin est une voie de lotissement destinée à être cédée à la commune, qu'elle veut construire un atelier au fond du jardin … Elle interpelle la commune à ce propos,  qui écrit au notaire, lequel  répond en reportant  les termes de la vente du chemin.  Il confirme implicitement, mais la mairie et la voisine qui ne semblant pas  être d'accord,  interpellent  à nouveau le notaire en disant que cette vente est contraire au cahier des charges du lotissement…

André se défend en expliquant au maire, par courrier, que le lotisseur n'a rien fait pour lui permettre d'avoir un accès à sa propriété, qu'en plus d'en avoir payé le prix, il a aménagé le chemin à ses frais, et que si la mairie veut ouvrir cet accès, il faudra lui en rembourser le prix et le coût de l'aménagement.

André ne cède pas. Le cabanon est achevé, la barrière maintenue fermée. Et l'affaire s'arrête là. La vieille étrangère, artiste peintre, se fait discrète. Il ne fait pas bon de se faire remarquer alors que les italiens viennent de partir et que l'on entend déjà les bottes des allemands résonner sur le bitume des villes de la côte d'azur.

 L'été s'achève, les tomates et les autres légumes ont bien été utiles à l'alimentation familiale car même si l'on est en zone libre, c'est l'époque des restrictions.  Les conserves vont être ramenées à Nice pour l'hiver. Les enfants ont été mis en pension parce que le ravitaillement y est assuré, les enfants sont surs d'être convenablement nourris.

         Mais les allemands, arrivés en septembre dans le village, craignent de plus en plus un débarquement sur le littoral de la côte d'azur.  Ils occupent déjà le phare qui leur permet une surveillance de la mer.

En février 1944, le village reçoit un ordre d'évacuation général. Les pinèdes et les plages sont minées. Les habitants qui ne savaient pas  ou se réfugier sont acheminés  vers l'Isère, d'autres se logent dans la famille à Nice ou dans les villages environnants.

         Le secrétaire de mairie, refuse de quitter le village. Il entretient le dialogue avec les troupes allemandes. Il  parviendra lors de leur départ précipité à la suite du  débarquement en Provence et de l'avancée des américains,  à obtenir de la part du commandant le plan des emplacements des mines et bombes disséminées partout dans la commune, sur les plages et les lieux stratégiques.
         Les habitants n'auront l'autorisation de revenir qu'en novembre  1944 qu'une fois le long déminage terminé.

         Durant cette période d'exode, André et Andréa restent à NICE. Mais comme tous les autres habitants du village, propriétaires… chacun regrette la tranquillité de ce coin de paradis, chacun se demande si il va retrouver un jour sa maison, dans quel état, bombardée par les alliés, pillée par les allemands, brûlée par vengeance…
                                                                    
                                                                A SUIVRE.....






jeudi 20 mars 2014

naissance de simple abri


La naissance de Simple abri


André et Andréa, mariés deux enfants, propriétaires de leur habitation principale,  souhaitent acheter une maison de vacances pour sortir de Nice, dès les beaux jours et surtout l'été quand la chaleur y est étouffante.

Le frère et la sœur d'Andréa les informent que le propriétaire du terrain voisin du leur veut vendre sa maison. Elle possède un assez grand jardin dans lequel on peut cultiver ses légumes, y avoir des arbres fruitiers...

Ils pensent à l'avenir et espèrent avoir leurs enfants et petits-enfants tous réunis, pour rassembler la famille.

La maison est grande, sur deux niveaux. Le propriétaire, ancien architecte-géomètre, avait installé son atelier au rez-de-chaussée. Il y a un garage qui ne communique pas avec l'habitation, une grande pièce pour l'élaboration des plans, une cuisine et un bureau, des toilettes et un escalier qui permet d'accéder au premier étage.  Là se trouve réellement l'habitation.  Trois chambres, une salle de bain, une cuisine au sud, une salle à manger double avec une cheminée, du parquet dans les chambres, un damier de  marbre noir et blanc dans les autres pièces, le jardin, au sud de la maison donne sur un deuxième lot de lotissement puis sur un troisième.
C'est absolument superbe.  Mais bien trop grand pour les besoins de la petite famille. Et puis c'est trop cher.

L'affaire ne se fera pas. Du moins pas ainsi, car le propriétaire conscient que la vente de trois lots de lotissement ensemble serait bien trop difficile, accepte de vendre en deux lots, la maison d'un côté avec son jardin, et le terrain restant en nature de terrain à bâtir.
D'ailleurs, la clôture entre ses deux propriétés n'a pas eu le temps d'être démolie. 
C'est le dernier terrain à bâtir à deux cent mètres du village.
C'est idéal et de surcroit, le terrain est contigu à la propriété du frère et de la sœur d'Andréa. Il suffit simplement d'ouvrir un portillon dans la clôture mitoyenne pour aller d'une propriété à l'autre.
Le tramway vient de Nice tous les jours et s'arrête sur la place du village, un peu plus bas.
Que des avantages!


Le 7 novembre 1939, l'acte de vente est signé chez le notaire.

Une des questions essentielles était aussi de savoir comment accéder à ce terrain.
 Le vendeur qui lui-même l'avait acheté 18 mois plus tôt, avait acquis du lotisseur par le même acte  le chemin d'accès qui longeait sa propriété sur tout son flanc ouest.

 Il faut bien dire que lui-même, quand il avait acquis son lot en fin 1929, la grande dépression pointait son nez. Il a su faire comprendre au lotisseur que les lots de 650 M² étaient trop grands donc trop chers. Il proposa d'acheter de moitié d'un lot. Le lotisseur accepta et divisa ainsi tous les lots du quartier en deux.
Mais certains ne bordant pas la route, il était  nécessaire de créer une voie d'accès pour quatre des lots dont aucune limite ne bordait la voie publique.
L'architecte-géomètre se chargea de dresser les plans de ces nouveaux lots. La voie fut dessinée d'une largeur de 6 m sur 48 m de long avec un cercle de 10 m de diamètre au bout pour le retournement des véhicules et fut prise à cheval sur la limite commune des lots avant division. A la jonction de ces quatre lots a été implanté le cercle devant servir d'aire de retournement.

Il acheta, le même jour que la sous division des lots, le premier terrain en bordure de la voie communale. C'était le lot 13. Il construisit sa maison, lui donna le nom de son premier enfant Jacqueline. Un petit garçon naquit ensuite.
Quelques années après, il acheta le lot 13 bis.  Sa propriété  forma ainsi,  à l'exception des trois mètres pris sur sa longueur pour la voie d'accès, l'ancien grand lot du lotissement qu'il avait divisé quelques années auparavant. Il planta des agrumes, des rosiers grimpants, aménagea une tonnelle.

Il finit même par acheter le lot 14 bis qui se situait dans le prolongement des deux siens, en févier 1938.
Mais en début 1939, il déménagea, mit cette maison à la vente et redémarra sa vie dans un autre département avec un autre métier.
Avait commis une erreur dans le cadre de sa profession ou sentait-il la guerre venir?

Les autres lots ayant une limite en façade de rue se vendirent aussi en 1929.  
Puis 3 des  lots issus de la division furent rachetés par ceux qui avaient acquis les lots en façade. Ainsi les anciens lots étaient reformés, à l'exception de la surface de la voie d'accès.

Seul le lot 14 bis restait désespérément sur les bras du lotisseur.  

Et la voie d'accès qui ne sert à personne n'est délimitée sur le terrain que par les clôtures des riverains. Le lotisseur n'a pas créée, empierrée, goudronnée cette surface. Elle n'est même pas débroussaillée, ne permettant aucun passage.

Les lots intérieurs, soit le 14 bis, 13 bis, 16, bis et 12 bis ne sont pas desservis par le tout à l'égout, l'eau potable, l'électricité…
 Nul n'en avait besoin car ces lots étaient à l'usage de jardin d'ornement.  Et l'accès se faisait par les lots en façade sur rue. Quoi de plus normal! On était simple à l'époque, et on appréciait le calme et la verdure des  espaces derrière leur maison. C'était intime, discret.

         Donc en 1938, l'architecte-géomètre acquière le lot 14 bis. A cette occasion le lotisseur lui cède la voie d'accès pour  désenclaver ce lot ci, les autres lots ayant déjà étaient vendus et formant de nouvelles unités immobilières desservies par la voie publique.
Le lotisseur ne veut pas faire de frais supplémentaire pour un seul lot. Il propose alors de se décharger de réaliser la voie d'accès, la viabilisation du lot, et en contrepartie il cède la voie comme un lot à bâtir.

C'est ainsi que la voie de lotissement devient privative. L'architecte géomètre vend le lot 14 bis et  sa voie d'accès le 7 novembre 1939. La guerre est déjà déclarée. C'est inespéré.
André et Andréa pensent placer leurs économies dans la terre, et ainsi sauver ce qu'ils peuvent. André a été mobilisé durant la grande guerre et blessé. Il ne sera pas appelé pour celle-là.  Il est déjà âgé de 45 ans.

Dès l'année 1940, aidé de ses fils, il débroussaille le terrain pour pouvoir y planter des légumes. Il a trouvé deux pièces à louer dans la maison à côté de ses beaux-frères et belles sœurs. C'est suffisant pour l'été. Il s'agit juste d'avoir de quoi dormir.
L'année 40 se passe, puis 41 et 42. La guerre est finie. On est en zone libre sous occupation italienne. Mais finalement chaque italien est un peu un parent. Tout se déroule bien.

Un jour il reçoit un courrier recommandé de la Préfecture l'informant qu'il faut qu'il libère les deux pièces qu'il loue dans le village car l'appartement est réquisitionné au profit d'une veuve de guerre avec un enfant.
Il répond à la préfecture  qu'il est lui-même  blessé de guerre avec des enfants, que  la santé de son épouse nécessite calme et repos en dehors de la ville et qu'il a droit à ce titre à conserver ce petit appartement,  qu'il est effectivement propriétaire du terrain contigüe mais que ce terrain ne dispose pas de construction.
Rien à faire, il doit rendre cet appartement.

Après réflexion, il prend la décision de faire construire un cabanon de six mètres de long sur quatre de large pour y dormir tous les quatre et y avoir une petite cuisine. 


Il appelle alors sa propriété SIMPLE ABRI.